Comme chaque fois qu'une nouvelle technologie fait son apparition, les pessimistes sonnent le glas d'un mode de vie : les films vidéo VHS devaient remplacer le cinéma, Internet la presse écrite et le courrier électronique les missives postales. Il est vrai toutefois que le volume de lettres à la poste s'est radicalement ressenti de l'avènement de la communication instantanée...
Christine Fischer Guy écrivait une intéressante revue de presse sur le phénomène du courrier électronique dans le Globle and Mail. Selon son enquête, à l'instar des personnes qui ont vécu la frustration d'échanger une série de courriels sans parvenir à se comprendre, comme par exemple pour l'établissement d'ententes d'affaires, le courrier électronique ne remplacera jamais la communication orale, face à face de préférence. La rétroaction visuelle et orale ainsi que toute la dimension du langage corporel parlent infiniment plus que des paragraphes, aussi éloquents soient-ils.
Pour citer ses sources :
- Une étude récente de Pew Internet and American Life Project révèle que la correspondance électronique a envahi la majorité des sujets de communication à l'exception de quelques-uns tels que la communication de très mauvaises nouvelles. De fait, les collègues de travail s'écrivent constamment plutôt que de se lever pour franchir les quelques mètres qui séparent leurs bureaux.
- Les équipes de travail établies à grandes distances qui utilisent uniquement le courrier électronique pour communiquer obtiennent des résultats désastreux et réalisent que des gouffres séparent leurs perceptions respectives. David Crystal, professeur de linguistique à University of Wales, en attribue entre autres la cause dans son récent livre Language and the Internet à l'écart de temps entre la réception d'un message et sa prise de connaissance. Il prône le développement d'un style d'écriture particulier pour le médium électronique car les malentendus sont fréquents dans les messages écrits, même entre individus qui maîtrisent particulièrement bien l'écriture.
- Selon Naomi Baron, professeure de linguistique et auteure du livre Cybertalk: Language and the New Millennium qui paraîtra bientôt, beaucoup de correspondants utilisant le courrier électronique obtiennent exactement le résultat qu'ils appellent, c.-à-d. un perpétuel monologue. Ces personnes n'écrivent pas pour être comprises mais plutôt pour s'écouter parler elles-mêmes de manière à sentir un certain contrôle sur le destinataire. L'augmentation des contributeurs aux tribunes téléphoniques ouvertes serait une autre manifestation de cette propension.
- Enfin, la nécessité de communiquer en personne trouve un écho intéressant dans l'étude très publicisée des chercheurs de Carnegie Mellon Robert Kraut et Sara Kiesler qui infirment une de leurs propres études antérieures en démontrant que l'investissement de temps à naviguer Internet n'est pas l'ennemi de l'équilibre social qu'ils en avaient fait... pour les sujets extrovertis ou socialement actifs. Pour ceux qui socialisent principalement dans le cyberespace, la solitude et la dépression augmentent en proportion avec le temps investi dans ce médium.
Reste pour nous à identifier les tenants du soliloque dans la communauté en ligne... et de les confronter en face à face!
12:19:42 AM
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