L'opposition officielle « dénonce » aujourd'hui le présumé conflit d'intérêt de Paul Martin qui aurait participé, à titre de ministre des finances, à quelques rencontres extraordinaires du conseil d'administration de Passage Holdings Inc., le conglomérat dont il est propriétaire et qui gère, entre autres avoirs, la Canada Steamship Lines Inc.
Le jeu de l'indignation culmine comme d'habitude sur la colline parlementaire, Stephen Harper exigeant que Martin renonce à ses entreprises s'il devait devenir premier ministre et le nouveau leader du NPD, Jack Layton, manquant une occasion en or de faire preuve d'originalité et voyant plutôt de l'arrogance dans le refus de Martin de liquider ses actifs.
Je n'ai pas encore entendu de commentaires de Joe Clark sur la question et j'espère qu'il évitera de tomber dans le jeu de la rectitude politique. Depuis quand le succès en affaires devrait-il nier à quelqu'un le droit de se lancer en politique? Pourquoi quelqu'un choisirait-il ou choisirait-elle de renoncer à des avoirs durement acquis pour le privilège de gouverner? Ah mais, j'oubliais, oui, bien sûr, rien de plus attrayant que d'être l'objet de la constante scrutation médiatique, des quolibets et autres attaques de toutes les personnalités publiques d'opinion opposée...
La réalité est que Paul Martin est un homme d'une grande compassion qui rêve d'une meilleure répartition des richesses entre pays riches et pauvres, d'une plus grande coopération Nord-Sud. Bien sûr, d'éventuelles provisions à l'encontre de la participation des membres du cabinet aux décisions politiques dont ils pourraient bénéficier personnellement ne viseraient pas Paul Martin en particulier. Il se trouve simplement à être, depuis belle lurette, le premier aspirant au titre de politicien en chef du pays qui présente un tel profil de succès en affaires.
Pourtant, prenant pour acquis la nomination d'un conseiller en éthique indépendant et l'élaboration de strictes règles de non-ingérence, rien ne s'oppose à ce que monsieur Martin ne devienne premier ministre du Canada et conserve une participation à ses différentes entreprises commerciales. Personnellement j'aime mieux être gouverné par un homme qui a réussi en affaires et qui comprend le milieu de la haute finance que par, disons, un travailleur social bien intentionné (j'aurais pu dire un écologiste, un universitaire, un syndicaliste; il me fallait simplement un bouc émissaire!).
Ironiquement, ce débat risque, plus que tout autre dossier public à date, de « coller » à monsieur Martin. Je ne serais pas surpris que, fidèle à l'intégrité et à la transparence qu'on lui connaît, il se sente obligé de prendre la juste décision et de liquider ses actifs... au profit de ses trois fils et son épouse, actuels directeurs de ses entreprises. La belle affaire. En plus de manquer le bateau comme résultat, le message ainsi télégraphié à l'endroit des candidats les plus prometteurs aux postes de décision publique serait à mon avis un bien mauvais message.
11:26:14 PM 
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